BRISSON, Jean-Luc, 2000 : Le jardinier, l’artiste et l’ingénieur,Article de MICHEL COURAJOUD – Editions de l’Imprimeur – Collection JARDINS ET PAYSAGES.

SEVRE Julie

Brisson, Jean-Luc, 2000 : Le jardinier, l’artiste et l’ingénieur,Article de Michel Courajoud – Editions de l’Imprimeur – Collection Jardins et Paysages.

Le livre est composé de différentes parties qui participent à cette même idée qu’a eu Jean-Luc Brisson de présenter la notion de paysage, le travail de paysagisme et le personnage du paysagiste dans lequel coexistent les savoirs de l’artiste, du jardinier et de l’ingénieur. Dans un premier temps, Jean-Luc Brisson nous explique donc sa démarche visant à prouver la nécessité du travail de terrain et l’effort que le paysagiste doit faire pour être relié à son site d’étude tout en gardant une certaine distance. Ensuite, commence le parcours entre le Potager du roi à VERSAILLES et le square Récamier à Paris d’un artiste, d’un jardinier et d’un ingénieur. Les trois personnages vont explorer à pied une vingtaine de lieux tels que des cimetières, des parcs, des autoroutes, ou des forêts et débattre de ce qu’ils voient et de leurs sentiments selon leurs propres points de vue, leurs propres domaines de pratique. Ce voyage est entrecoupé de trois textes de trois auteurs différents, présentant trois approches différentes du paysage. Le premier est du philosophe Gilles A. TIBERGHIEN et présente l’aéronaute brésilien ALBERTO SANTOS-DUMONT, pionnier de l’aviation ayant construit de nombreux ballons dont le premier dirigeable et pour qui la navigation aérienne permettait de voir et de comprendre la ville et le paysage sous un nouvel angle, « une perspective modifiée », un horizon déplacé, « un point de vue vertical ». Un autre texte du philosophe et géographe Jean-Marc Besse « s’attache à éclaircir le concept de paysage et ce qu’il recouvre » car c’est un domaine bien difficile à cerner tant il recoupe différent es disciplines, et est enseigné dans différentes institutions comme l’architecture, l’urbanisme ou encore l’écologie et la littérature. Dans ce sens, Jean-Marc Besse va présenter différentes facettes du paysage que sont « le paysage comme représentation, le paysage comme réalité objective et le paysage comme expérience ». Enfin, le troisième texte est du paysagiste Michel Corajoud qui dans « une lettre aux étudiants », expose les postures à adopter pour répondre à un projet de paysage dont le programme nous a été donné. C’est à cette lettre et surtout à un des neufs points qu’est « ouvrir son projet en cours » que nous nous intéresserons particulièrement.

La première posture à adopter à l’annonce d’un projet est de « se mettre en état d’effervescence ». Pour pallier rapidement à un manque de connaissances sur le site donné, il faut formuler de très nombreuses questions dont les réponses peuvent rester évasives dans ce premier temps de l’étude, l’important étant de s’interroger le plus possible pour s’imprégner au mieux du site. Dans le même temps, il faut commencer à dessiner ses premières intuitions de travail sans attendre, car ce sont ces premières perceptions qui vont permettre la « genèse du projet ». Ensuite, le site doit être « parcouru en tous sens » pour observer les caractéristiques, développer son « regard analytique », dégager des données objectives, formelles et sensibles du lieu, « distinguer les influences, les signes, les références et surtout les pratiques » qui le font vivre. Dans un deuxième temps, sur le site, il est nécessaire d’« explorer les limites, les outrepasser » car aucune limite donnée dans un sujet de projet n’est légitime, le paysage ne peut se fragmenter, il est continu, et les espaces mitoyens permettront peut être de comprendre ou même de justifier le lieu choisi, ses caractéristiques, son histoire. De même que l’horizon est une limite glissante suivant notre place dans le site, les limites se déforment, évoluent, sont mouvantes. Arrive le temps du travail en atelier. Grâce à des outils permettant de travailler le site sans y être concrètement tels que les photographies, les vidéos ou les croquis par exemple, on pourra analyser les données et formuler les premières pistes du projet sans se trouver « enlisé dans la complexité de la situation paysagère ». Mais plusieurs allers-retours avec le site sont alors nécessaires pour vérifier l’adaptabilité du projet dans le lieu, pour l’ajuster au mieux : « quitter pour revenir ». « Traverser les échelles » et comprendre ce qui fait que le paysage forme un tout sable et durable, tant dans ses détails que sa globalité permet de tenter la transposition dans le projet. Nourrir ses connaissances du site par l’histoire de son passé historique, les formes et images passées pour en arriver jusqu’au lieu d’aujourd’hui vont ensuite permettre, par un travail rétrospectif et prospectif, d’« anticiper » et de dégager des tendances et même « entrapercevoir des images ». Le projet ne devrait pas être forcément un acharnement à la construction, il faut avoir des actions modérées et adéquates et « défendre l’espace ouvert». Michel Corajoud pense qu’un aspect primordial de la présentation du projet est d’« ouvrir son projet en cours ». Elle ne doit pas seulement rendre compte du résultat du travail mais doit expliciter toutes les démarches, les hésitations, les choix, les évolutions, l’histoire ou encore les tâtonnements car ce n’est que grâce à l’enchaînement de ces différentes postures que le projet trouvera sa légitimité et s’adaptera au mieux à d’éventuels utilisateurs. Enfin et surtout, il faut « rester le gardien de son projet » ; ne pas se laisser dérouter ou envahir par les interlocuteurs car nous sommes les seuls à connaître parfaitement le fil conducteur de notre idée ! Michel Corajoud étant paysagiste, son idée se portait plutôt sur un projet paysagé mais il s’adapte aussi bien aux projets d’architecture.

BRISSON, Jean-Luc, 2000 : Le jardinier, l’artiste et l’ingénieur,Article de CORAJOUD, Michel , Editions de l’Imprimeur , Collection Jardins et Paysages.