CHIIORI « maisonnette de la flûte », Iya, Shikoku, JAPON.

COQUART Jordane

CHIIORI « maisonnette de la flûte », Iya, Shikoku, JAPON.

Le texte d’ANTOINE PICON présente l’évolution du rapport entre l’architecture, les sciences et la technique de manière chronologique en se limitant à l’architecture occidentale. J’ai choisi d’étudier une petite ferme japonaise nommée CHIIORI « maisonnette de la flûte ».

Cette humble bâtisse, construite pour la première fois au début du 18eme siècle puis reconstruite selon les mêmes plans et les mêmes techniques de nombreuses fois me semble être intéressante en tant que manifeste du style traditionnel japonais. D’une stabilité étonnante à travers l’histoire, cette forme d’habitat s’est généralisée durant la période Edo (1600 – 1868) et est encore aujourd’hui bien vivante dans les campagnes et les banlieues. Cette constance paraîtra surprenante à notre regard européen devant les nombreuses contraintes qu’imposent un tel type de construction. En effet, la structure en bois portant la lourde toiture, en plus de sa grande fragilité au séisme et aux typhons n’ai que très peu protégé contre les incendies (la seule protection consistant en une couche d’argile et de plâtre recouvrant le faux plafond : le kura). La maison est close sur trois des quatre faces par des parois en torchis (Shinka bé) et par des parois mobiles en papier de riz (les Shoji) sur la dernière.

Le plancher, surélevé de 40 cm du sol n’est pas isolé et laisse, comme toutes les autres parois, passer les courants d’air.

Le bâtiment ne protège donc pas du froid et, même au cœur de la maison, la température intérieure est en général la même qu’à l’extérieur. Un européen ne pourrait vivre dans pareilles habitations et ce serait empressé de trouver les solutions techniques à ces « problèmes ». En fait, ici la technique n’a pas suivi la course effrénée du progrès. Soumise à de nombreux codes, la technique est utilisée comme un moyen de communication sociale.

Les formes et les matériaux utilisés expriment le rang d’une famille, non pas par la taille des maisons qui varie peu mais par le traitement des détails : Espèce de bois utilisé, épaisseur des tatamis, qualité des papiers …

La quête esthétique est ici dominante et intimement lié à l’art du fengshui. Contrairement aux traditions européennes, les indications fonctionnelles sont toujours très discrètes, et non lourdement soulignées (dépourvus de meuble, les espaces peuvent s’adapter grâce aux cloisons amovibles à l’usage du moment). Le plaisir de l’architecture ne vient pas ici du plan (Ne variant que peu il s’organise toujours autour du tokonoma et l’irora sur une trame définie par la taille des tatamis) mais de la qualité des matériaux : veines du bois mises en valeur, lourdeur majestueuse des poutres, perfection de formes des toitures, sans parler de l’art du jardin …

Ce principe de fonctionnement très codifié implique la standardisation des éléments. Ajouté à la «franchise» de ses structures qui s’organise selon une hiérarchie claire, ce type de construction permet à ses habitants d’évaluer facilement l’état de santé de leur maison et éventuellement de l’entretenir eux-mêmes.

Plusieurs choses dans cette approche me semblent être intéressantes pour mon projet. La première concerne cette vision du plaisir architectural. C’est ici le détail, plus que l’ensemble qui fait la qualité du bâtiment. Qualité des matériaux, des assemblages, du rapport entre les différentes parties. L’architecture japonaise joue sur les détails visibles par tout un chacun et non sur des points visibles seulement par l’œil de l’architecte.

L’aspect « didactique » qu’offre ce type d’architecture me semble également particulièrement intéressant. Loin des structures complexes calculées par ordinateur, ici les éléments s’expriment de manière claire. Particularité intéressante pour un projet d’école d’architecture. De manière plus générale, je pense qu’il faut également retenir le soin accordé par les Japonais aux rapports qu’entretiennent leurs maisons avec la nature. En utilisant uniquement des matériaux locaux, d’une part mais également par le travail fait sur les vues. Le bâtiment s’intègre pour former un tout cohérent avec la nature comme le préconise les règles du Fengshui.

http://www.chiiori.org/

http://www.enpc.fr/enseignements/Picon/Textsonline.html

CHIIORI « maisonnette de la flûte », Iya, Shikoku, JAPON.