GUILHEUX, Alain (2012) : Action architecture, Éditions de La Villette.
Il est important pour aborder ce livre de faire dans son esprit une sorte de tabula rasa de tous les préconçus que l’on peut avoir concernant la chose architecturale. Nous sommes, et ce livre tente à le démontrer, à l’aube d’une nouvelle dialectique de la forme architecturale comme de la forme urbaine. De tout temps l’architecture était conçue pour durer. Cette durée permettait de marquer le territoire, imposé des frontières, des limites. Mais elle avait pour but aussi de symboliser une culture, une ethnie, une religion. Aujourd’hui nous sommes dans tout autre débat, avec les nouveaux médias, les modes les transports, nous vivons sur un monde fini, qui tend aussi à s’accélérer. Nous ne sommes plus dans la durée mais dans l’immédiateté. L’image fait et défait. Exister sur l’écran c’est déjà exister tout court. La mondialisation a tombé les frontières, plus de limite non plus. On est dans le temps du vif pour reprendre une expression de Paul VIRILIO où il est question de la vitesse et du mouvement. On est plus dans la profondeur de champ, mais dans la profondeur de temps. Être dans une perspective du temps réel, celle de l’accélération. Le vide et le vite donne le vif c’est-à-dire le vivant. De l’ensemble du livre je n’ai retenu que deux auteurs dont le travail semblait suivre une certaine cohérence et une continuité dans l’esprit. Cette trame est à la foi lier aux nouveaux réseaux informatiques, qu’a la dématérialisation de l’architecture connue jusque-là. L’usage systématique du préfix « hyper » dans l’ensemble des textes fait comprendre que nous sommes passé dans un autre temps. Une autre façon d’habiter, de ce déplacé de penser même. Une nouvelle perception du monde en soi
1/ Post-séduction. L’invention de nous-mêmes, le métier de l’Empire Alain GUIHEUX L’Exposition Universelle de NEW YORK de 1939 semble pour Alain GUIHEUX la date charnière où l’architecture est passée d’un objet signifiant et durable à une fabrication d’objets plus anecdotiques animés par des intérêts plus spéculatifs. Cette appréciation concernant l’exposition universelle et due à la présence de designers dans le rôle d’architecte tel Norman Bel GEDDES associé à Edward BERNAYS. L’architecture est devenue un objet de consommation mais aussi un objet qui nous transforme. Car tout ce qui nous touche tout ce que nous voyons nous transforme. Ce qu’avait compris Edward BERNAYS en travaillant avec les cigarettiers, il installait la société de consommation. On peut en déduire que l’homme s’invente continuellement. Et qu’il crée les objets de cette invention. L’invention de nous-mêmes est accélérée par la modernité même. Et l’architecte suit le mouvement comme le designer, le publicitaire, le chef de produit marketing ou l’homme politique. L’architecture participe de cette transformation de nous-mêmes. C’est aussi pour cela que les architectes tentent de théoriser leur métier. Pour lui donner la valeur qu’il a perdue, mais n’est ce pas déjà trop tard. L’architecture du début du XXème siècle à tenter de créer « l’homme nouveau » Celle de la fin du XXème siècle à elle créée « l’homme consommant » dans les années 80 l’architecture fut comprise comme un code social. Une image de représentation. Mais cela aliéna l’architecte à un certain nombre de codes. Les objets, pardon !, les bâtiments doivent être repérable, immédiatement traduisibles. Une autre menasse avec laquelle l’architecte doit tenir compte c’est le nomadisme. La tente, la caravane reste des objets à habiter mais peuvent être conçues par d’autres comme les ingénieurs ou les designers. À propos de déplacement, la voiture a aussi transformé la ville, la question urbaine ne ce pose plus vraiment, puisque l’ensemble du territoire est devenus une ville. Si les bâtiments deviennent objet de consommation pourquoi la ville ne suivrait pas ce chemin. Il suffit de voir les entrées de ville, immenses magasins à ciel ouvert où l’architecture a perdu toute raison d’être. L’architecture devient une tête de gondole. Dans les années 30, aux ÉTATS-UNIS, l’architecture a poussé à consommer, mais elle s’est prise à son propre piège. La post-séduction. À force de dispositifs et de mise en scène la ville et l’architecture sont devenus des étrangers. Cette distance nous libère de la contrainte consumériste. C’est une occasion pour l’architecte de reprendre la main. À partir de nouveau mode de vie proposait une nouvelle forme d’habiter. Sans attache mercantile, redonner du fond à l’architecture. 2/ L’hyper Elizabeth MORTAMAIS Définition : HYPER – Préfixe – du grec ancien ????, hypér (« au-dessus, au-delà ») C’est à partir de ce préfixe qu’Elizabeth MORTAMAIS pense désormais à une réorganisation des modes de vie. Le terme hyper ayant envahi la phraséologie des sociologues. La société ne serait plus binaire, image propre à la modernité, mais serais perçue comme de l’hypertexte. Hypertexte est un des systèmes qui a permis de développer en parti internet. C’est le moment de l’instantanéité, du réactif. C’est aussi le moment de concevoir d’autres modes de pensée, de productions et d’organisation. Les objets nomades comme le GPS (Global Positionning Système) ou d’information comme le SIG (Systèmes d’Informations Géographiques) ou les liens informatiques comme Internet 2.0 sont des exemples de cette coexistence dans une société. La preuve de l’hypertexte au niveau mondial. À l’heure ou seulement 17% des travailleurs Européens fabriquent un bien, tous les autres fabriquent du savoir, de l’information ou du service. Une activité complètement dématérialisée. C’est cette nouvelle activité qui dessine un nouveau paysage. À l’instar de routes et des voies de chemin de fer. C’est un paysage immatériel cette foi. L’hypertexte crée des paysages virtuels. Tous les objets nomades participent à la création du flux, deviennent eux-mêmes des flux, des routes. Mais sans les contraintes géographiques. Ils redessinent la planète. Ces cartes numériques ont créé de nouveaux univers. Certes très précis mais n’invoquant plus le corps. L’hyper a effacé les frontières physiques, les frontières de la fatigue et du temps. Autre grande modification c’est le fractionnement des activités immatériel, que devient l’architecture. Quelle forme nouvelle sera engendrée de ses mutations. Comment appliquer du tangible à de l’abstrait. Le terme de foyer est devenu obsolète, est que le foyer n’est-il pas l’écran de l’ordinateur? Cet écran qui nous fait ressortir aussitôt. L’architecte saura-t-il recréer des «foyers» ou deviendra-t-il pas un technicien de la domotique. L’hyper condense toutes les informations et les redéployes instantanément. Il fabrique la « rizomatisation » du monde. Tout est à flux tendus, le monde est au vif (à vif ?) C’est un monde qu’il faut réapprendre. En particulier pour l’architecte qui vit encore dans un temps long. Entre architectures objet ou total dématérialisation, l’architecture doit se faire une place. Deux solutions s’offre à elle : soit elle anticipe les futures mutations comme par exemple dès aujourd’hui la question de l’environnement, soit elle attend une nouvelle révolution post-numérique. Dans tous les cas de figure, elle ne sera plus l’architecture du passé, des monuments faits pour l’édification des peuples. Et pour paraphraser LE CORBUSIER elle ne sera plus seulement une machine habitée, mais aussi à travailler, à voyager, à se divertir, à se cultiver. Elle sera en continuelle reconstitution et se modifiant au gré des innovations. Comme nous l’avons vu plus haut, au-delà de la simple représentation formelle c’est une interdépendance continuelle entre l’habiter et l’habitant. MOUCHET P.
GUILHEUX, Alain (2012) : Action architecture, Éditions de La Villette. VIRILIO, Paul, 1977 : Vitesse et Politique, Editions GALILÉE, 151p. GUIHEUX, Alain, 2004 : La ville qui fait signe, PARIS : Éditions du Moniteur, 2004, 296 p. MORTAMAIS, Elizabeth; MAGERAND, Jean (2009) : Vers l’hyperpaysage, Editions L’Harmattant, 2009. MORTAMAIS, Elizabeth; MAGERAND, Jean (2003) : Vers la cité hypermédiate: Du modernisme-fossile à l’hypercité-immédiate, Editions L’Harmattant, 2003. PICON, Antoine (2010) : Culture Numerique Et Architecture: Une Introduction, Birkhauser, 2010. GEDDES, Norman Bel (1939) : General Motors Highways & Horizons: New York World’s Fair, General Motors Corporation, 1939. COLLECTIF (1939) : Futurama, General Motors Corporation, 1939. BERNAYS, Edward Louis (1939) : Propaganda, 1936. |