LEWIS, Duncan; FRANCOIS, Edouard (1999) : Construire avec la nature, Editions Edisud.
Cet ouvrage écrit par Duncan LEWIS et Edouard FRANÇOIS présente la démarche et expose les principaux projets de l’agence d’architecture éponyme, ouvrage paru avant que chacun des associés ne crée leur propre agence. Cet ouvrage reflète une production singulière dans le paysage architectural puisqu’elle met en avant une problématique particulière : « construire avec la nature ». En ce sens les auteurs mettent un point d’honneur à dépasser les cloisonnements traditionnels entre l’architecture, le paysage, le territoire et l’écologie. De leurs propres mots, «l’architecture est faite pour enchanter ». Elle doit être désirable pour répondre aux besoins contemporains (envie de nature…) et elle doit s’inscrire dans le territoire. Leur démarche exprime avant tout un compagnonnage avec la nature. Il ne s’agit pas de s’opposer ou de s’imposer à la nature mais de faire en sorte que l’architecture intègre les différentes facettes de la nature (paysage, parfums naturels, inclusion du végétal dans le bâti).
Cette pratique n’est pas nouvelle, « la végétatisation est un courant persistant de l’architecture » (dixit Francis RAMBERT). Plusieurs architectes reconnus se sont confrontés à l’intégration de la nature dans leur production (HUNDERTWASSER, MALLET STEVENS, Jean RENAUDIE…) chacun avec leur propre style. FRANÇOIS et LEWIS quant à eux métissent à travers leur architecture deux courants artistiques : le Land Art et l’ Arte povera. Ils font du « Land Arch ». Ils prônent d’une certaine manière une disparition de l’architecture non seulement comme objet formel mais aussi comme discipline, les limites entre architecture et paysage étant dépassées. Ce dépassement des limites apparaît à travers les différentes interventions de l’agence : celle-ci travaillant aussi bien sur des projets d’infrastructures linéaires, des projets d’architecture manifestes, d’immenses sites en déshérence que sur des micro-réalisations. Ils articulent pérennité et éphémérité. Les murs végétalisés de Patrick BLANC ont été déclencheurs dans leur démarche (intégration du végétal dans le construit). Cela leur à donner goût à la simplicité, au low tech, à l’utilisation de matériaux bruts sans pour autant parler d’architecture écologique d’un point de vue technique. FRANÇOIS et LEWIS travaillent sur des images et des concepts de Nature « forts » où les questions du visible et de l’invisible se posent. 20 projets ou réalisations à travers toute la France, d’échelles et de programmes différents, ont été sélectionnés. Ils traduisent leur manière de construire avec le paysage : La conception d’un viaduc de 450m de long dans la vallée classée de la BIÈVRE dans le cadre de la réalisation de l’autoroute A125 (1993) : les concepteurs ont opté pour une réalisation mimétique où les poteaux du viaduc prennent l’apparence des arbres environnants et le projet se fond dans le paysage. La conception des têtes de tunnel de l’autoroute A20 entre BRIVE et MONTAUBAN (1994) : dans un environnement marqué par des grottes exemplaires (Lascaux), FRANÇOIS et LEWIS conçoivent des entrées de tunnel prenant l’apparence de grottes. L’extension du groupe scolaire BUFFON à THIAIS (1995) : ils réalisent une école dans les arbres La construction du collège Saint-Prix (1993) : en réaction à la disparition programmée d’îlots boisés, ils réalisent un collège compact qui apparaît comme une « parcelle boisée équipée et habitée ». La reconstruction du lycée technique MONGE à SAVIGNY-SUR-ORGE (1996) : l’agence reprend l’idée du mimétisme en réalisant un lycée sur pilotis dans le cadre d’un environnement boisé. L’aménagement intérieur d’un bar parisien : disposant d’un budget minimal, les concepteurs inspirent l’idée de nature dans un espace confiné par le simple enchevêtrement de bambous et la réalisation d’un plafond végétalisé. La réalisation de serres dans le cadre du festival des jardins de CHAUMONT-SUR-LOIRE (1996) : le principe de la bambouseraie est repris et affiné par rapport à l’aménagement du bar mentionné précédemment. La construction d’une maison dans les arbres à SAINT-CLOUD (1997) La conception d’une station de traitement des eaux à NANTES (1995) : LEWIS et FRANÇOIS décident de dépasser les limites opérationnelles de leur intervention se limitant à la parcelle d’une station d’épuration en proposant un traitement d’ensemble d’un secteur déqualifié (regroupant déchets et polluants) sur près de 100 ha. L’aménagement d’ensemble se présente comme le parcours et la transition d’une eau trouble en eau claire. Un immeuble de bureau à ROUEN (1994) : le dialogue envisagé avec la forêt environnante et une autoroute se traduit par le traitement de l’enveloppe. La façade correspond à une double peau remplie d’aiguilles de pins. L’échos avec l’environnement est renforcé par les propriétés isolantes (acoustique et thermique). Un centre des conférences à AIX-EN-PROVENCE (1992) : l’enveloppe de la construction constituée de tiges fines de métal brut oxydé disparaît entre les troncs d’arbres. La conception d’un restaurant et des aménagements paysagers au sein du technopôle de CHÂTEAU-GOMBERT à MARSEILLE (1995) : les concepteurs cherchent à conforter l’ambiance champêtre des abords. Un restaurant sur le toit du centre Georges POMPIDOU à PARIS (1998) : le projet « plug-in forest » initie une terrasse comme un prolongement de l’intérieur du bâtiment dont l’ambiance souhaitée doit correspondre à un sous-bois. La conception d’un immeuble de 25 logements sociaux au bord du canal de l’Ourcq à PARIS (1996) : à la charnière de deux zones, les concepteurs choisissent de réaliser deux bâtiments dont les façades traduisent pour chacun leur environnement immédiat distinct Une maison individuelle à ORLÉANS (1997) : ils combinent deux archétypes architecturaux contradictoires. Celui de la « tour élancée » et celui du concept de « forêt habitée », visibilité contre invisibilité. La conception d’un hameau de 10 logements de vacances à JUPILLES (1996) : en alternative aux lotissements pavillonnaires lambda, l’agence LEWIS et FRANÇOIS regroupent dix logements derrière une paroi végétale, une « haie » qui correspond à un traitement particulier des limites entre le construit et le naturel. La conception de 62 logements sur les berges du Lez à MONTPELLIER (1998) : les architectes utilisent le gabion en référence aux empierrements rustiques des berges du Lez. Ce dispositif permet à la végétation de coloniser les parois. Ce rempart minéralo-végétal est surmonté de cabanes perchées dans les arbres. Les réalisations de l’agence Edouard FRANÇOIS Duncan LEWIS & associés font apparaître une relation intime entre la nature et le construit où les limites sont floues et poétiques. Leur architecture intègre les différentes dimensions du développement durable (souci de réponse à des besoins sociaux, vision économique par l’emploi de matériaux low tech, dimension environnementale où le végétal est un élément d’architecture). Leur architecture mimétique paraît simple mais non simpliste, plus portée sur l’image globale que sur la précision du détail mais elle inscrit une position affirmée à l’environnement et au territoire. PIERRE S.
LEWIS, Duncan; FRANCOIS, Edouard (1999) : Construire avec la nature, Editions Edisud. OTTO, Frei (1985) : Architecture et bionique : constructions naturelles, Editions Delta et Spes (DENGES) SCHOFIELD, Maria (1980) : Architecture et nature : 18 exemples internationaux, Editions du Moniteur (PARIS) FRANCOIS, Edouard (2000) : Flower tower : exposition à l’Institut français d’architecture, 31 mai-17 septembre 2000, Institut français d’architecture (PARIS) QUEYSANNE, Bruno (1998) : Nature d’architecture, Ecole d’Architecture de GRENOBLE (GRENOBLE) |