DE SICA, Vittorio, 1948 : Le voleur de Bicyclette, film, 90’.

Film considéré comme une œuvre emblématique du mouvement néo-réaliste. Une œuvre qui confirmera le talent de metteur en scène de Vittorio DE SICA, dont la carrière demeure l’une des plus électriques du cinéma Italien.


DE SICA, Vittorio, 1948 : Le voleur de Bicyclette, film, 90′.

Né le 7 juillet 1901 à SORA, petit village de moyenne montagne de la province de FROSINONE entre ROME et NAPLES, il décèdera d’un Cancer du Poumon à NEUILLY-SUR-SEINE en France en 1974.

Il débutera le spectacle à l’âge de 15ans, mais, c’est après avoir commencé une carrière de comptable qu’il abandonne, pour jouer dans des troupes ambulantes, qu’il se fera remarquer par un producteur de spectacle et devient tête comme acteur, danseur et chanteur. Il devient au début des années trente un des jeunes premiers les plus en vue. C’est l’époque du cinéma des « téléphones blancs », qui donne à l’ITALIE fasciste une image des plus rassurantes à coup de comédies sophistiquées, drames mondains ou fresques historiques exempts de toute critique sociale ou politique.

DE SICA qui se sent en décalage avec les grosses productions italiennes, passe à la réalisation au début des années 40 et prend ses marques dans la comédie et le mélodrame.

Après une rencontre avec le scénariste Cesare Zavattini pour « les enfants nous regardent », ce sera le tournant de sa carrière, ils formeront un des piliers du mouvement néo-réaliste qui surgit à la fin de la guerre et le cinéma devient alors sous l’œil des auteurs néo réalistes un témoin direct des convulsions sociales et historiques de l’Italie post-fasciste.

Après un premier manifeste, Sciuscia, en 1946 montrant le destin tragique des enfants de la guerre réduit à cirer les chaussures des GI’s et le marché noir sera un échec et DE SICA sera accusé de traitre par sa patrie. C’est aux Etats-Unis que le film Sciuscia remportera un grand succès et remportera l’Oscar du meilleur film étranger pour la première fois attribué à un film italien.

Aussitôt, DE SICA s’attèle à son prochain film, « le voleur de bicyclette », adaptation du livre « les voleurs de bicyclettes », 1946 de Luigi BARTOLINI. Mais, plus un producteur ne croit en DE SICA, Il sera aidé par un comte et des amis qui se chargeront de produire le film avec des acteurs non professionnels et tournent sur le vif dans les rues de ROME.

Les premières projections publiques du voleur de bicyclette auront lieu en novembre 1948 avec les meilleures appréciations du public, mais la sortie nationale en décembre sera rejetée par le public, il voit sa carrière de cinéaste terminé, mais c’est une projection à PARIS devant un public d’artistes et d’intellectuels qui lui redonne de l’espoir et il obtiendra plusieurs prix en Italie, un nouvel Oscar à HOLLYWOOD et sera classé le 2éme meilleur film de tous les temps 10 ans plus tard.

Chômeur depuis deux ans, Antonio RICCI (interprété par Lamberto MAGGIORANI), père de 2 enfants, trouve un emploi d’afficheur dans sa ville italienne. Pendant une crise sociale de l’après guerre d’un chômage sans précédent où le travail est indispensable pour vivre. Il est recruté pour un emploi de colleur d’affiches sous condition d’avoir une bicyclette. La reprise économique de l’après guerre se faisant difficile, il avait déposé son vélo en consigne qu’il échangera contre des paires de draps pour récupérer sa bicyclette. Toute une famille prise dans la spirale du travail qui est la principale source de survie..


Le lendemain, lors de la première mission de colleur d’affiches il se fait dérober sa « bécane ». La honte l’envahit à tel point qu’il ne rentrera pas chez lui pour partir à la recherche de son outil de travail dans ROME qu’on lui a volé. Un incident si banal mais ce vélo est devenu son outil de travail, et faute de le retrouver, il devra retourner au chômage.

Le soir, après des heures de courses inutiles dans les rues avec son fils à la recherche du voleur qu’il ne parviendra pas à attraper, il explorera tous les marchés de gros et de pièces détachés sans mettre la main dessus.

Epuisé de fatigue, le désarroi le pousse à la vengeance, et vole à son tour une bicyclette posée sur le trottoir, mais rattrapé puis relâché il se retrouve aussi pauvre mais avec seulement, en plus, la honte de s’être ravalé aux rangs de son voleur. Le fils pleure son père, le regard de l’enfant jusqu’alors sous le signe de l’admiration, marquera une étape décisive dans la relation entre le père et l’enfant.

Un film qu’il n’y a même pas matière d’un fait divers, une histoire qui ne mériterait même pas une parution dans le journal local. Loin des tragédies réalistes de PRÉVERT où le fait divers est une véritable machine infernale. Le film ne possède en lui-même aucune scène dramatique et prend sens qu’en fonction de la conjoncture sociale dans la société italienne des années 1948.

Le vélo représente une époque ou les moyens mécaniques sont rares et chers.

La rue est la seule scène, pas de studio pour répondre aux exigences du néo-réalisme italien, même les acteurs sont recrutés sur le tas parmi les badauds de la rue.


Une actualité sociale qui n’est pas mise en avant dans le film mais qui se fait sentir, ce milieu ouvrier, ou pour survivre ils doivent se voler entre eux, où tout le monde est impliqué. La thèse du vol ne sera jamais démontrée, contrairement à un film de propagande qui chercherait à nous démontrer que l’ouvrier n’arrivera pas à retrouver son vélo.

Au contraire, il est sur les traces du voleur avec des obstacles qu’il ne peut pas franchir, et qui risque de le renvoyer au chômage. L’homme était considéré comme un dieu au regard de son fils, un regard sous le signe de l’admiration, le geste du père les a compromis, le rapport entre père et fils qui ne sera plus qu’un rapport d’égaux et vivront avec le secret et la honte.

« Son film montre le souvenir d’un mouvement qui montre combien le cinéma n’arrive à une expression artistique, à un langage humain et social universel, que s’il offre la signification des mouvements, des drames collectifs de son temps ». Résumé extrait du DVD, le voleur de bicyclette de Vittorio DE SICA.

MATEOS-MARTIN B.

 

 

 

DE SICA, Vittorio, 1948 : Le voleur de Bicyclette, film, 90′.

DE SICA, Vittorio, 1946 : Sciuscià, film, NB, Alfa Cinematografica, 84 mn, 1946.

BARTOLINI, Luigi, 1946 : Ladri di biciclette, Editions Polin, Roma, 1946.