GUIHEUX, Alain, 2004 : La ville qui fait signe, Paris : Éditions du Moniteur, 2004, 296 p.
GUIHEUX, Alain, 2004 : La ville qui fait signe, Paris : Éditions du Moniteur, 2004, 296 p.
La ville qui fait signes produit l’expérience urbaine, à la fois documentaire et fonctionnelle, simulation de projets, une lecture et donc une transformation, au travers du travail de l’image contemporaine, du devenir du sol commun de la mégalopole européenne, LILLE. Le territoire de la métropole lilloise s’est constitué au rythme du développement industriel, puis des infrastructures routières et des transports au travers des implantations nouvelles et des mouvements de population et d’emplois. L’espace et les modes de vies ont été bouleversés par le développement des infrastructures. A partir de 1950, l’urbanisation montre un univers mixte mélangeant résidences, lieux de travail, parcs et hangars. L’appel à la ville dense, la réanimation des centres villes, hantent les élus et les architectes. Pourtant nous sommes dans un univers urbain qui transforme les terres agricoles encore présentent en espaces industriels ou de résidence.
La vue aérienne (photo IGN) est une archive contemporaine qui décrypte l’étalement urbain. Cet un outil de lecture de la ville : « d’en haut nous possédons imaginairement la ville ; d’en bas, c’est elle qui nous domine. » Cela permet aussi des changements d’échelles dans la lecture ; On peut voir l’intérieur d’une maison, et tout de suite après, l’EUROPE entière.
L’urbanisation sépare aussi physiquement les populations qui l’étaient déjà économiquement. Les règles de vie commune sont : produire, distribuer et consommer dans une société qui a besoin de raccourcir au maximum les distances de temps entre production, distribution et consommation.
On passera en un siècle, d’une ville commerciale traditionnelle à une ville « européenne » structurée par des réseaux : les réseaux soudent les gens, les lieux, les institutions et l’environnement dans un tout cohérent. Les réseaux ont aussi fait se déplacer les centres-villes comme par exemple les centres commerciaux et tertiaires installés autour des nœuds de réseaux.
Cependant, le rôle des réseaux est clos, il n’y a plus rien de neuf à envisager, on revient donc au boulevard urbain. Maintenant, pour promouvoir une ville, une région, il existe le marketing urbain : manifestations culturelles afin d’attirer touristes et emplois.
Avant, la lisibilité d’une ville se faisait par lecture géographique, aujourd’hui il y a de nouveaux modes de repérages, c’est une ville de données (GPS etc…). Le réseau a été longtemps l’icône de la modernité. Les vues aériennes prisent par IGN (qui a couvert la métropole lilloise depuis 1950) rendent compte de la transformation du paysage sur une durée qui avoisine désormais celle d’une vie.
Sont visibles : les programmes de logements sociaux sur le principe des grands ensembles, l’étalement urbain permis par l’automobile et le développement des réseaux, la création de villes nouvelles, l’arrivée de lotissements pavillonnaire, le développement de zones commerciales.
La ville est un objet géographique, un objet historique, et un objet social. Le paysage de la ville forme un ensemble de signes que les gens peuvent décrypter s’ils en possèdent les clés. Les lieux sont des points signifiants du territoire : lieux de travail, lieux identifiés sur une carte, domicile comme lieux le plus individualisé. Mais les signes ne sont pas que des lieux : les individus, les autres qui voyagent dans la ville.
OÙ S’ACHÈVE LA VILLE ?
Chercher à définir la métropole lilloise renvoi à un emboitement d’objets géographiques chacun porteurs de sens par rapport au concept de la métropole.
MAIS OÙ SONT LES LIMITES DE LA VILLE ?
Villes, agglomérations, métropoles, régions urbaine, quelle est la signification de ces mots ?
Le XIX s avait déjà bouleversé la physionomie des villes et des régions touchées par l’industrialisation. Au départ LILLE est contenu dans l’enceinte de VAUBAN en 1670, ensuite le remplissage urbain se fait dans les limites de la nouvelle enceinte en 1858. Mais au-delà de LILLE, c’est en quelques décennies une vaste agglomération qui se forme. L’historicité au service du discours métropolitain, l’histoire et la culture d’une ville sont des vecteurs de l’image métropolitaine. Exemple : rénovation de «la vieille bourse », une EUROCITÉ doit pouvoir faire référence à son passé et à sa culture.
En 1970 et 1980, c’est le patrimoine industriel qui est redécouvert et transformé en logements, bureaux, universités… L’explosion démographique qui accompagne le développement industriel au XIX s est spectaculaire : LILLE passe de 52000hab en 1800 à 217000 en 1911, même chose pour TOURCOING et ROUBAIX (8000 à 124000). A la fin du XIX s et début XX s, l’accroissement de la mobilité des ouvriers permis par l’usage des deux roues, des chemins de fers, du tramway…, contribue à la poussée urbaine périphérique. Chaque pôle a développé ainsi une banlieue.
Cette urbanisation s’inscrit dans une tradition forte dans le Nord de la France : la maison individuelle dont la proportion y compris en ville, est bien plus forte qu’ailleurs.
GUIHEUX, Alain, 2004 : La ville qui fait signe, Paris : Éditions du Moniteur, 2004, 296 p.
MUTATIONS : EURALILLE. Les années 1990 marquent un virage important pour la métropole lilloise. A la croisée des TGV, entre LONDRES, BRUXELLES et PARIS, EURALILLE représente l’archétype de la ville en réseaux : centre d’affaires, centre commerciale, centre résidentiel. EURALILLE est un programme fort ; il s’agit par la représentation urbaine de marquer le passage du statut d’agglomération industrielle en mutation à celui de métropole européenne (eurocité) branchée sur les réseaux d’échanges internationaux. Il y a donc eu une transformation économique pour avoir une transformation urbaine. EURALILLE est aujourd’hui un succès.
Il faut noter maintenant la tendance au retour des investissements commerciaux majeurs en centre ville plutôt qu’en périphérie. LILLE en 2004, passée du statut d’agglomération industrielle à celui de métropole émergente, LILLE est un bon exemple de la mutation qui touche nombre de villes d’Europe (BARCELONE, GLASGOW…). LILLE et toutes ces villes sont entrées dans un nouveau temps de leur histoire : celui de la ville postmoderne : image internationale, qualité urbaine, mise en réseau à l’échelle européenne. A valeurs nouvelles, enjeux nouveaux : quel renouvellement urbain, et quelle ville durable ? Nouvelle espace de solidarité et d’identification pour une communauté en devenir.
Après un « urbanisme de création et d’extension », caractéristique d’un mode de production fordiste de l’espace, voici venu le temps de « l’urbanisme de transformation » résumé par une formule : « reconstruire la ville sur elle-même ».
KAVYRCHINE, Mathieu, 2004 : Portrait, installation video, Le Fresnoy, Tourcoing, 2004.
MATTHIEU KAVYRCHINE : PORTRAIT .
L’artiste a voulu réaliser ici une œuvre vidéo autour de la notion de panoramique. Suite à plusieurs clichés effectués depuis les tours lilloises, Il a gardé des courtes séries de repérage sur les jardins.
Ces vues plongeantes révèlent un espace privé derrière les murs, elles livrent une image de la personnalité des habitants. Il a voulu mettre ces petits morceaux de terrains en regard avec l’immensité du territoire de la métropole lilloise.
La démarche consistant à se promener sur tout le territoire en voiture, lever la tête, repérer des endroits et d’imaginer ce qui allait pouvoir être filmé depuis chaque tour.
Le but est de donner à voir des espaces ou parfois les terrains agricoles se mêlent aux surfaces commerciales ou au cœur des cités de la métropole.
« d’en haut nous possédons imaginairement la ville ; d’en bas, c’est elle qui nous domine. »
BENOIT, Mylene; BOUVIER, Mathieu, 2003 : L’herbe, sur un paysage interstitiel, video, couleur, FRANCE, 10min.
MYLENE BENOIT + MATHIEU BOUVIER : L’HERBE (SUR UN PAYSAGE INTERSTITIEL)
Durant les mois de mars et d’avril 2003, munis d’un appareil photo et d’une photo aérienne en guise de carte, la meute a sillonnée à pied tout un périmètre de la conurbation lilloise, sur une aire d’env 20km2 autour de son principal nœud autoroutier.
Le but de la meute était de débusquer sur le terrain tous les espaces qui lui paraissait trouer la trame urbaine et périurbaine : espaces délaissés, interstices ou lisières, friches, espaces sans quailtés entre deux espaces utiles, îles désertes, mini-steppes….
Le principe de l’installation est une image ( une photo aérienne, issue de la campagne de prise de vue orthographique menée en 2001 par la communauté urbaine de LILLE, qui donne à voir la portion de territoire explorée par la meute) imprimée sur une toile en pvc dont la trame est ajourée : durant tout le temps de l’exposition, une herbe naturelle pousse à travers les interstices de la toile, aux endroits découverts lors de ses randonnées et foulés par les pas de la meute.
Cette herbe désigne les taches blanches qui délient encore la trame urbaine de la métropole lilloise.
« Fabriquer de la distance dans un espace-temps en voie de resserrement incessant », c’est non seulement dénicher et réinventer des espaces libres, mais c’est aussi écarter la trame des temporalités, réintroduire dans l’expérience des durées relatives, des vitesses différentielles.
La marche à pied, la course aux abords des voies d’autoroutes sont des façons de reprendre patiemment possession d’un espace dont nous n’avons plus d’ordinaire, depuis nos voitures, qu’une perception subliminale.
MARTIROSYAN, Nora, 2002 : Bienvenue/Welcome , projet photographique.
NORA MARTIROSYAN : welcome .
L’artiste se promène dans les rues de Roubaix, le soir. Elle est seule et étrangère, personne ne l’attend. Obscurité, brouillard, elle cherche en vain un café pour boire un thé et se réchauffer, tout est fermé.
«Les volets sont lourds et ne laissent passer aucun son, aucune lumière. Découragée, apeurée, elle ne contrôle plus son imagination. Elle est comme le jeune Franz BAUER perdu dans la cité de SAMARIS.
Et si elle frappait à une de ces portes… La porte s’ouvre, toute la famille est là, autour de la table à rire, parler affaires, des enfants qui n’obéissent pas, des mines désaffectées, de l’insécurité et du bon vieux temps, de l’industrie textile, des bals populaires au FRESNOY. Ca fait du bien d’être avec vous, vous souriez, vous avez l’air content. Vous vous souvenez de vieilles blagues que je n’ai jamais entendu, mais ici, tout le monde les connaissent par cœur et éclate de rire en se tapant dans le dos. Vous oubliez que je suis là moi aussi, je me sens soudain exclue, comme si le côté de la table où je me trouve n’existait plus. Ma vue se trouble et la perspective se déforme bizarrement. La table s’allonge de plus en plus, vous êtes d’un côté, tous ensemble, je suis de l’autre, séparée par des kilomètres qui s’ajoutent à n’en plus finir. Je quitte la table mais j’ai du mal à marcher jusqu’a mon appareil photo, on dirai que l’air est liquide, il entrave mes mouvements.
C’est moi qui me trouve dans un aquarium, je suis le petit poisson qui vous fixe à travers l’objectif. Je voulais être avec vous, mais ma vraie place est de l’autre côté du verre, d’où je peux vous observer avec peur et admiration.»
JUGNET D.
GUIHEUX, Alain, 2004 : La ville qui fait signe, Paris : Éditions du Moniteur, 2004, 296 p. SCHUITEN, François, & PEETERS, Benoit, 1983 : Les murailles de Samaris, Editions Casterman. MARTIROSYAN, Nora, 2008 : Adieu Cheburashka, éditions la Villa Saint Clair, Sète. MARTIROSYAN, Nora, 2008 : Les complices, film Super 16, 40 min. MARTIROSYAN, Nora, 2002 : Bienvenue/Welcome , projet photographique. BENOIT, Mylene; BOUVIER, Mathieu, 2003 : L’herbe, sur un paysage interstitiel, video, couleur, FRANCE, 10min. KAVYRCHINE, Mathieu, 2004 : Portrait, installation video, Le Fresnoy, Tourcoing, 2004. |