ZWEIG, Stefan, 1944 : Le monde d’hier, souvenirs d’un Européen , Le Livre de Poche ; 506 pages, traduit par Serge NIÉMETZ.


ZWEIG, Stefan, 1944 : Le monde d’hier, souvenirs d’un Européen , Le Livre de Poche ; 506 pages, traduit par Serge NIÉMETZ.

 

« Le soleil brillait vif et plein. Comme je m’en retournais, je remarquais soudain mon ombre devant moi, comme j’avais vu l’ombre de l’autre guerre derrière la guerre actuelle.

Elle ne m’a plus quitté depuis lors, cette ombre de la guerre, elle a voilé de deuil chacune de mes pensées, de jours et de nuit […]

Mais toute ombre, en dernier lieu, est pourtant aussi fille de la lumière et seul celui qui a connu la clarté et les ténèbres, la guerre et la paix, la grandeur et la décadence, a vraiment vécu «

 

 

 

Né en 1881 à VIENNE en AUTRICHE d’une famille juive aisée, il se prend de passion pour la littérature, la philosophie et l’histoire, pour finalement être reçu docteur en philosophie à 23 ans.

 

C’est avec une boulimie passionnelle qu’il dévore toute source de culture.

 

Il commence à écrire des poèmes, reçoit le prix BAUERNFELD, se lance dans l’écriture théâtrale.

 

Arrive alors la 1ère guerre mondiale qui voit monter son esprit de révolte qu’il fera transparaître dans de nombreux écrits dénonçant les valeurs morales factices d’une société en décadence.

 

En 1934, il part s’installer en Angleterre, voyage en France, aux états unis, au brésil ou il s’installe et où il se donnera la mort en 1942, laissant ce message :

 

«Avant de quitter la vie de ma propre volonté et avec ma lucidité, j’éprouve le besoin de remplir un dernier devoir : adresser de profonds remerciements au BRÉSIL, ce merveilleux pays qui m’a procuré, ainsi qu’à mon travail, un repos si amical et si hospitalier. De jour en jour, j’ai appris à l’aimer davantage et nulle part ailleurs je n’aurais préféré édifier une nouvelle existence, maintenant que le monde de mon langage a disparu pour moi et que ma patrie spirituelle, l’Europe, s’est détruite elle-même.

Mais à soixante ans passés il faudrait avoir des forces particulières pour recommencer sa vie de fond en comble. Et les miennes sont épuisées par les longues années d’errance.

Aussi, je pense qu’il vaut mieux mettre fin à temps, et la tête haute, à une existence où le travail intellectuel a toujours été la joie la plus pure et la liberté individuelle le bien suprême de ce monde. Je salue tous mes amis.

 

Puissent-ils voir encore l’aurore après la longue nuit ! Moi je suis trop impatient, je pars avant eux.»

 

 

 


 


 


 


 


 


 

Dans son ouvrage Le monde d’hier, SWEIG fait son autobiographie mais avant tout et surtout l’analyse d’une époque et la chronique du temps qu’il a vécu avec passion et désarroi, partant de l’AUTRICHE de sa jeunesse qu’il qualifiera d’âge d’or de la sécurité et de l’opulence 1895 et se terminant par l’agonie de la paix et sa fuite au BRÉSIL en passant par l’ANGLETERRE et les ETATS-UNIS.

 

Tout commence par une description envolée d’une VIENNE ville de culture et de musique ou règne la sécurité l’entrain et l’opulence de la monarchie Austro-Hongroise qu’il décrit en ces termes :

 

«Il n’y avait guère de ville en Europe où l’aspiration à la culture fût plus passionnée qu’à Vienne. […]

À la cour, dans l’aristocratie, dans le peuple, les sangs allemand, slave, hongrois, espagnol, italien, français, flamand s’étaient mêlés, et ce fut le génie propre de cette ville de la musique que de fondre harmonieusement tous ces contrastes en une réalité nouvelle et singulière, l’esprit autrichien, l’esprit viennois.»

 

Viens ensuite une description d’un PARIS de toutes les libertés sentimentales et créatives qu’il qualifiera de «PARIS, la ville de l’éternelle jeunesse. «

 

Éclate alors la guerre de 1914 et l’installation du nazisme qui valurent à ZWEIG ses élans de protestation et de révolte le plaçant au rang des insurgés contestataires. ZWEIG évoque ses lendemains de défaite avec le ton des prophètes désolés d’avoir eu raison trop tôt, le dépeçage de l’AUTRICHE résonne en lui comme un rétrécissement et une régression dont il faut accepter l’irréversibilité.

 

La fin de l’Empire d’Autriche c’est aussi la fin de l’idée selon laquelle des peuples très différents peuvent partager un destin commun, une défaite de l’esprit européen qui présage déjà de son anéantissement dans le nazisme.

 


 


 


 


ZWEIG devient dès lors un très fin analyste de cette montée de la peste brune en ALLEMAGNE comme en AUTRICHE.

 

Stefan SWEIG a écrit ce livre alors même qu’il avait décidé de mettre fin à ces jours, acte qu’il accomplira finalement en se suicidant dans le courant de l’année 1942 après avoir tout perdu.

 

 

CULTY B.

 

ZWEIG, Stefan, 1944 : Le monde d’hier, souvenirs d’un Européen , Le Livre de Poche ; 506 pages, traduit par Serge NIÉMETZ.