ROYOUX, Jean-Christophe, 2000 : Le modèle de la conversation entre construction du moi et l’espace public, in Oublier l’exposition – ArtPress 21.
ROYOUX, Jean-Christophe, 2000 : Le modèle de la conversation entre construction du moi et l’espace public, in Oublier l’exposition – ArtPress 21.
RÔLE/FONCTION DE LA CONVERSATION DANS L’ART.
Dans les années 80, la conversation est un paradigme fort de la définition de l’art après 1960.
Pour l’art contemporain, la discussion permet l’élaboration d’une pensée non rigide (cf. exposition/séminaire, sites on-line, art conceptuel…).
Plusieurs artistes font de la conversation mais cette forme d’art ne peut être, selon J-C ROYOUX, identifiée que par le relais d’expositions. (ex. : Ian WILSON en 1972, un des 1er artistes à faire de la conversation « oral communication »). Les expositions sont la condition de l’existence publique de l’art.
D’après l’auteur, il existe deux formes de conversations dans l’art contemporain :
• le modèle fermé (cf. minimalisme) qui met en forme le processus de construction d’un individu dans la société (construction du moi),
• le modèle ouvert qui offre des propositions artistiques de reconstruction d’un espace public de communication.
Dans l’art contemporain, la conversation permet de comprendre combien :
• la forme d’exposition correspond à une scène de représentation dans le même temps que son appropriation par chaque spectateur. (cf. « cinéma d’exposition »). L’exposition crée une situation.
• Elle rend compte d’une situation spécifique du rapport entre les sujets et un monde.
« La conversation est un dispositif de mise en scène d’une communauté en train de se faire et de se refaire » (J-C. ROYOUX).
Pour ROYOUX, il y a aujourd’hui une double implication de la pratique de la conversation dans l’art : la forme du langage privé qui produit un effet d’opacité et un appel à la constitution d’un espace public de discussion.
Exemple du groupe Art & Language qui utilise la conversation dans la pratique artistique et qui refuse d’opposer le langage à un objet ou une image.
L’élargissement de l’art au langage rend compte de la logique d’élaboration de l’oeuvre, du contexte historique, du matériel utilisé. L’art ne se suffit plus à lui-même, il comprend à la fois l’oeuvre et les conditions qui la rendent possible. (cf. art conceptuel : geste critique fondamental, l’oeuvre est décrite dans des textes qui permettent de la mettre en place ou l’oeuvre exposée correspond aux textes qui la décrivent). Le langage permet de répondre aux questions quand, où, comment ?, c’est un supplément nécessaire à la prise en compte de l’objet en tant que tel (existence empirique/description linguistique).
Le langage dans la pratique collective induit la multiplication des points de vue.
Ex. INDEXS (1972-1975) : c’est la matérialisation des discussions du groupe Art & Language, une cartographie. (cf. minimalisme pour la sculpture, les réflexions correspondent à une mise en scène de plusieurs points de vue). Contrairement au minimalisme, dans la pratique d’Art & Language le dialogue entre les membres d’un groupe d’artiste est rendu public. Ce n’est plus un monologue intérieur.
Ex. Numéro Deux de Jean-Luc GODARD (film/dialogue, conversation).
La conversation a un caractère scénique, l’exposition ressemble plus à une forme transitive. Depuis le surréalisme, le travail et la mise en évidence du processus de production de l’art s’est concrétisé par un rapprochement entre image et écriture. La transposition du langage oral par écrit (cf. Indexs d’Art & Language) fait de l’art une occasion d’apprendre quelque chose à quelqu’un.
« La conversation est une stratégie pour reconstruire une image, donner une forme à une présence absente, ceci à travers une multiplicité de points de vue : image-mentale, image-souvenir, image-projection, image-paysage, image-personnage. »
(J-L. ROYOUX d’après Philippe PARRENO).
Pour P. PARRENO, la conversation déplace de la fonction d’auteur vers celle de chef d’orchestre.
Par ailleurs, elle modifie la relation art/musée, art/spectateur/ artiste. L’artiste devient en quelque sorte un coordinateur.
Ex. le travail de Olivier BARDIN montre comment la relation de l’artiste à son public est modifiée. Au moyen d’un dispositif ressemblant plus à un plateau de télévision (décor, scène, présentateur..), il met en tension l’animateur et les interlocuteurs. 2 personnes (animateur + 1 spectateur) sont sur le plateau alors qu’une 3ème personne est derrière une vitre, elle n’entend pas les paroles. Ici la parole ne surgit qu’à cause d’un dispositif contraignant.
Dans cet exemple on voit bien comment la parole est utilisée pour mettre en scène. L’implication du spectateur (individu) participe à la construction d’un espace public de communication (l’exposition).
Si la conversation est à la limite entre construction du moi et reconstruction d’un espace public de communication, quel parcours, quel type de lieu pour prendre en compte ces 2 caractéristiques ? Comment permettre l’introduction du langage dans les expositions ?
ROYOUX, Jean-Christophe, 2000 : Le modèle de la conversation entre construction du moi et l’espace public, in Oublier l’exposition – ArtPress 21.
ART & LANGUAGE, 1972 : Index 001, in Conceptual Art, LONDRES, PHAIDON, 2002.
GODARD, Jean-Luc, 1975 : Numéro Deux, 88′, FRANCE.
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