ALBERA, François, 2000 : Cinema : quand le décor s’expl(l)ose, in Oublier l’exposition – ArtPress 21.
ALBERA, François, 2000 : Cinema : quand le décor s’expl(l)ose, in Oublier l’exposition – ArtPress 21. François ALBERA est professeur à l’Université de LAUSANNE et à l’École Supérieure des Arts Visuels de Genève, ainsi que directeur de recherches au Fonds National de Recherche Scientifique. Il montre, dans cet article, le lien étroit qu’il existe entre le cinéma et l’architecture, et en quoi le cinéma, cet « art citadin », selon Françoise PUAUX, a non seulement ouvert de nouveaux champs d’exploration à l’architecture mais joue aussi à l’interprétation du monde par la mise en œuvre d’une symbolique. ARAGON, en 1918, parle de la « beauté urbaine », la réalité de la ville, de la rue, comme le « décor » adéquat du Cinéma, idée reprise par des artistes comme Fernand LÉGER. Cependant, le cinéma des années 1910 et 1920, se conçoit plutôt comme une « vitrine » en mouvement. En effet, il devient lieu d’exposition, de propagande des objets de l’architecture d’intérieur ( les arts décoratifs,… ). Un autre aspect de la conception du décor apparaît dans le cinéma russe des années 1920 : celui-ci devient un terrain d’expérience, une possibilité de projection. Les architectes peuvent déployer un monde utopique sous la caméra. N’oublions pas que le décor de Cinéma reste factice, et qu’il obéit encore et toujours à la loi de l’image. Architecture de l’éphémère, il peut cependant devenir le vecteur même de la conception filmique, « le matériau profilmique » (M. SERCEAU) dans les réalisations du Cinéma d’avant-garde de ROSSELLINI et d’ANTONIONI, ou encore dans les films de Jacques TATI. F. ALBERA amène à établir un parallèle entre la démarche du cinéaste et celle de l’architecte. Même si c’est l’illusion de l’espace architectural qui prône dans le premier cas, c’est un travail sur les points de vue, les cadres, les séquences qui s’opère. De même, dans les deux cas, le spectateur/visiteur peut s’immerger dans un espace illusionniste. L’architecture prend alors son sens de décor : « Je crois que l’architecture est un sujet souvent utilisé comme toile de fond, ce qui est également sa véritable place dans la vie ; le cinéaste, lui, l’interprète » (J. NOUVEL). Au final, on voit que le Cinéma expose l’architecture au sens strict où l’entend Freud, comme un « souvenir-écran ». L’exposition est ici affaire de surface, elle est une image. Suffit-il donc de créer un « décor » répondant à une interprétation particulière, pour placer le spectateur/visiteur dans cet état de contemplation, nécessaire à toute exposition ? Les murs du musée ne sont-ils que des « toiles de fond » sur lesquelles viennent s’ « exposer » les œuvres d’art ? ALBERA, François, 2000 : Cinema : quand le décor s’expl(l)ose, in Oublier l’exposition – ArtPress 21. |